J'ai bien dormi. Mais j'avais tellement besoin de sommeil que ce n'est pas étonnant. Je n'ai pas eu trop froid. Les couvertures en laine lama ont fait leur effet. Je vais prendre mon petit déjeuner avec toute la petite famille. Grâce au feu de la cuisinière, il fait bon dans la pièce. Le plafond est noir de suie. Consuela m'explique que cette maison a plus de cent ans. C'était ses parents et ses grands-parents qui l'habitaient. Aujourd'hui, il ne fait pas très beau. On annonce de la pluie. Ça me conforte dans l'idée de partir. Sans appareil photo, je suis comme un cowboy sans colt. Je préfère me rendre le plus rapidement possible dans une grande ville pour le faire réparer. Consuela m'annonce que la route est coupée à cause de la pluie tombée cette nuit. Le minibus qui devait partir à 11 heures n'a pas pu passer à cause de l'état de la piste. Trop de boue. Que faire ? Rester ici à attendre un hypothétique départ demain et aller se balader dans les nuages ? On me dit qu'il y a peut-être des transports qui fonctionnent dans le village voisin, Chavin de Pariarca, situé à une dizaine de kilomètres de là. Après tout, ça fait deux bonnes heures de marche. Ça se tente. Je prépare donc mon sac. Je m'équipe pour une marche qui risque d'être humide puis vais dire au revoir à Consuela. Au moment de partir, une moto passe devant nous. Consuela lui demande où il va. À Chavin. Peut-il me transporter moyennant finance. Ok ! Super ! Je grimpe à l'arrière de sa bécane avec mes deux sacs. Le gros sur le dos et le petit devant. Nous voilà partis. Très vite, nous rendons compte de l'état de la piste. De la boue partout et des ornières de camion énormes. Ça glisse bien. J'ai horreur d'être derrière une moto. Là, je suis servi ! Mais mon chauffeur est plutôt doué. Il n'empêche qu'il faut s'accrocher. Plusieurs fois, je suis obligé de descendre de la moto car c'est trop risqué. Pour éviter les ornières de boue, nous sommes parfois contraint de passer sur les cotés de la route et de longer le ravin. Faut pas que ça glisse... Séquence frisson ! Puis, pour couronner le tout, la pluie nous tombe dessus. Nous nous arrêtons dans un petit bistrot le temps que ça se calme. Il y a là trois poivrots qui sirotent de l'alcool local. Je suis obligé de me reculer lorsqu'ils me parlent tellement ils empestent. La pluie se calme. Nous repartons. Une vraie patinoire. Finalement, au bout d'une heure de piste d'enfer, nous arrivons, sans être tombés, à la place du village de Chavin. Je pense que j'aurai mis beaucoup plus de temps que prévu si j'étais venu à pied. Et dans quel état ! Je remercie chaleureusement mon chauffeur qui a conduit comme un chef. Je me renseigne sur les possibilités de transport pour me rendre à La Union, située à une centaine de kilomètres de là. On me répond qu'un minibus est parti ce matin et qu'il n'y en aura pas d'autre aujourd'hui. La poisse ! Il y a un petit hôtel tout miteux sur la place. Au moins, je ne dormirai pas dehors. Je vais me renseigner. Le type me dit d'attendre un peu. Il y a parfois des voitures ou des camions qui passent. Je vais donc m'installer sur un des banc de la petit place et attend qu'une opportunité passe. Je discute un peu avec une femme qui vend des bonbons. Elle est gentille. Elle me remonte le moral en me disant que je vais sûrement trouver un véhicule cet après-midi. Il se met à pleuvoir. Je vais me réfugier avec elle dans les locaux de la municipalité. C'est sommaire mais au moins, on est à l'abris. Je partage quelques gâteaux secs avec elle. Arrive une camionnette 4x4 avec deux ingénieurs de travaux publics pour les travaux de la route. Ils viennent voir les services techniques de la ville. Puis ils repartent. Comme je pense qu'ils travaillent dans le coin, je n'ai même pas l'idée leur demander s'ils peuvent m'emmener. Cinq minutes plus tard, une autre voiture s'arrête devant nous. Le conducteur nous demande si on n'a pas vu passer une camionnette. Je lui confirme que oui, il y a à peine cinq minutes et qu'elle est partie par là. Je lui demande si, par la même occasion, il ne pourrait pas m'avancer un peu. Il n'a pas l'air très enthousiaste à l'idée mais en insistant un peu il finit par accepter. Je dis au revoir à ma copine et me voilà reparti. Je finis par comprendre que mon chauffeur veut rattraper le 4x4 pour retourner avec eux à Huanuco. Il fonce donc dans la boue. On racle le fond de caisse plusieurs fois. Dérapages controlés. Du Dakar en direct. Son unique but, rattrapper cette foutue camionnette. On l'aperçoit au loin. Il fonce de plus bel. Nous finissons par la rattraper. Nous sommes à peine à une centaine de mètres derrière elle. Appels de phare et coups de klaxon. Soudain, une flaque de boue. On cale au milieu. Impossible de redémarrer. La camionnette ne nous a pas vu, elle continue son chemin. Mon chauffeur est furieux. Il met un temps fou à ouvrir le capot qui est bloqué. Lorsqu'on arrive enfin à le décoincer, il découvre qu'une cosse s'est débranchée. Sûrement à cause des vibrations et chocs de sa conduite sportive. Puis nous voilà reparti à fond. J'accroche ma ceinture. Je ne sais pas si ça servira à grand chose, surtout au fond du ravin. On va dire que c'est psychologique. Nous croisons des ouvriers sur la route. Au passage, il en prend un pour ramener son véhicule lorsqu'il aura rattrapé ses collègues. Au bout de dix minutes, nous finissons par les doubler dans un village. Nous montons donc tous les deux dans la camionnette. L'ouvrier fait demi-tour et ramène le véhicule sur le chantier. Les trois ingénieurs me proposent de me déposer en bas de la vallée au croisement des trois routes. Eux retournent sur Huanuco et moi, je veux aller vers Huaraz. On discute sur les travaux de la route. Difficile de bosser dans ses conditions climatiques. Au milieu d'un village nous rencontrons un gros bus qui patauge dans la boue. Comme nous sommes bloqués derrière lui, j'en profite pour lui demander où il va ? À La Union ! Incroyable, j'ai le cul bordé de nouilles... Je dis au revoir à mes trois ingénieurs de la route et monte dans le bus. J'apprends qu'il va jusqu'à Lima. Génial, il va pouvoir me déposer encore plus loin, jusqu'au croisement de la route Lima-Huaraz. Je n'aurai plus qu'à trouver un autre bus pour faire les 80 kilomètres restant. C'est dans ces moments là qu'on est heureux de vivre. On se dit que finalement tout n'est pas si compliqué. Mais je reconnais que j'ai quand même beaucoup de chance en général. Nous nous arrêtons dans tous les villages pour ramasser des voyageurs. Ça prend du temps mais je suis confortablement assis et je ne suis pas pressé. Je m'émerveille devant tout ces paysages splendides. Il y a plein de petits villages perchés sur la montagne. Nous descendons doucement dans la vallée jusqu'à Puente Tingo où nous retrouvons le goudron. Notre vitesse moyenne augmente alors fortement. Malheureusement, la nuit tombe vite en montagne et bientôt nous n'apercevons plus que les silhouettes des reliefs. Nous grimpons pour atteindre un col à 4 720 mètres d'altitude. Puis nous redescendons doucement. Tout le monde dort plus ou moins dans le bus. Nous arrivons enfin à ma bifurcation vers 21 heures. Le bus me dépose le long de la route. Je pensais que c'était un village mais non, quelques cahutes au bord de la route qui vendent du fromage. Maintenant, le plus dur, ça va être d'arrêter un bus en pleine nuit. En marchant quelques mètres, je découvre une petite boutique qui vends des boissons et des barres chocolatées. J'ai à peine le temps de demander le prix que j'aperçois un bus qui va dans ma direction. Je lui fais un signe de la main. Il s'arrête. Vous allez Huaraz ? Oui, montez ! Incroyable, je n'ai même pas attendu cinq minutes. Je me demande s'il n'y a pas une caméra cachée ? Qui aurait parié que je serai à Huaraz ce soir ? C'est un bus luxueux à deux étages. À l'intérieur, tout le monde dort. Je m'installe confortablement à une place de libre et ferme les yeux comme tout le monde. Une petite heure plus tard, nous arrivons sous la pluie à Huaraz. Il est 10 heures, il va falloir trouver une chambre d'hôtel. Ça ne devrait pas être très compliqué. Hauraz est une ville touristique d'où partent de nombreuses randonnées à pied. Au pied du bus, un type propose son agence de voyage pour faire des excursions dans la région. Je lui réponds que pour le moment, ma priorité est de trouver un hôtel. Il en connaît un près de la Plaza de Armas. Pas cher et vachement bien. Après tout pourquoi pas ? Ça m'évitera de chercher dans la nuit et sous la pluie. En puis, s'il n'est pas bien, je changerai demain. Au passage, il harponne une touriste suédoise. Nous voilà tous les trois partis à pied vers l'hôtel. Effectivement, il n'est pas mal. Moïse, c'est son prénom, nous propose de nous revoir demain pour nous proposer ses excursions. Ok, demain parce que là, crevé ! Comme je n'ai rien avalé de la journée, je vais rapidement dîner dans un chinois puis douche puis au lit. Quelle journée !
Ah lala, ça commence à devenir palpitant....Heureusement que ce n'est pas ton premier voyage!!!!J'espère que tu as pu trouver une solution pour ton appareil de photos.
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